Pour un salaire minimum cantonal
Le comité unitaire pour un salaire minimum cantonal annonce ce vendredi 12 mai le lancement de la récolte de signatures de 2 initiatives populaires cantonales. La première, constitutionnelle, propose d’ancrer le principe dans la Constitution ; la seconde propose une nouvelle loi instituant un salaire minimum de CHF 23.- brut et détaillant son application. A l’instar de ce qui s’est déjà concrétisé dans plusieurs cantons voisins, le salaire minimum lutte contre le phénomène des travailleurs pauvres et la discrimination des femmes, évite que des personnes se retrouvent à l’aide sociale et donne un référentiel minimal facilement vérifiable et contrôlable par tou-te-s les employeurs-ses et employé-e-s. La récolte de signatures s’étend jusqu’au 12 septembre.
Initiative législative « pour le droit à vivre dignement de son travail – pour un salaire minimum cantonal »
POUR LE COMITÉ D’INITIATIVE, UN SALAIRE MINIMUM CANTONAL…
… est une urgence : la crise du Covid-19 a mis en évidence la précarité de très nombreu·se·x·s salarié·e·x·s, souvent dans les activités les plus essentielles. De nombreuses entreprises ont reçu des aides publiques pour faire face à la crise. Elles doivent maintenant garantir aux salarié-e-x-s des salaires leur permettant de vivre dignement! Et l’inflation actuelle renforce encore cette précarité. Carburant, chauffage, primes d’assurance maladie, la hausse des prix frappe de plein fouet les ménages modestes qu’il est urgent de soutenir
.… permet de vivre dignement: selon le rapport social vaudois, en 2017, 14% des salarié·e·x·s du privé touchaient des «bas salaires » (moins de 3930 francs). Ils·elles gagnaient donc moins que les deux tiers du salaire médian. Aujourd’hui, environ 10% des salarié·e·x·s sont concerné·e·s. Le salaire minimum s’attaque à une des causes des bas salaires : la sous-enchère salariale pratiquée par les patron·ne·s. Les grandes entreprises et leurs actionnaires bénéficient de gros cadeaux fiscaux de la part du canton. Il est grand temps de mettre un coup d’arrêt à l’exploitation des salarié·e·x·s; ce sont pourtant elleux qui produisent la richesse !
… complète et renforce les conventions collectives : les conventions collectives ne sont pas suffisantes pour lutter contre les bas salaires. Elles ne couvrent qu’environ
50 % des salarié·e·x·s du canton. Or, ce sont justement dans les secteurs qui ne sont pas couverts que sévit principalement la
sous-enchère salariale résultant des abus patronaux. L’initiative implique syndicats et employeurs dans l’application du salaire
minimum cantonal.
… est un pas pour lutter contre les discriminations salariales à l’égard des femmes : aujourd’hui, les femmes représentent plus de 60 % des personnes à bas salaires. En améliorant le salaire de milliers de travailleuses touchant de faibles rémunérations, le salaire minimum légal sera un pas concret vers l’égalité salariale dans les faits, contre l’exploitation indécente de dizaine de milliers de femmes salariées, et contre leur paupérisation encore plus grande à l’âge de la retraite !
… est souhaité par la population : le droit à un salaire minimum avait obtenu le soutien de 48,89 % votant·e·x·s vaudois·e·x·s en 2011. Depuis, les cantons de Neuchâtel, Jura, Genève (avec plus de 58 % des suffrages exprimés), Tessin et Bâle-Ville ont introduit un salaire minimum légal cantonal. Et bientôt, d’autres devraient encore s’ajouter à cette liste. Ce sont des signaux très clairs marquant la volonté d’en finir avec des salaires qui ne permettent pas de vivre dignement
Cet argumentaire n’engage que ses auteur·e·x·s
Initiative constitutionnelle « Pour le droit à vivre dignement de son travail – salaire minimum cantonal »
Art. 1 But
1 La présente loi a pour but d’instituer un salaire minimum afin de combattre la pauvreté, de favoriser l’intégration sociale et de contribuer ainsi au respect de la dignité humaine
Art. 2 Champ d’application
Champ d ’application 1 La présente loi s’applique aux relations de travail qui se déroulent habituellement dans le Canton de Vaud.
Exceptions 2 Sont exclus du champ d’application de la présente loi :
a Les contrats d’apprentissage au sens des art. 344 et suivant du code des obligations.
b Les contrats de stages nécessaires à l’accès à une formation certifiante ou s’inscrivant
dans une formation certifiante.
c Les stages de réinsertion professionnelle ou sociale.
d Les contrats de travail ayant cours avec des jeunes de moins de 18 ans révolus
Art. 3 Montant du salaire minimum
Montant 1 Le salaire minimum est de 23 francs par heure.
Salaire déterminant 2 Par salaire, il faut entendre le salaire déterminant au sens de la législation en matière d’assurance-vieillesse et survivants, à l’exclusion d’éventuelles indemnités payées pour jours de vacances et pour jours fériés.
Le 13 e salaire est pris en compte dans le salaire déterminant pour autant qu’il soit prévu par écrit.
Indexation 3 Chaque année, avec effet au premier janvier, le salaire minimum est indexé sur la base de l’indice suisse
des prix à la consommation du mois d’aout précédent, par rapport à l’indice en vigueur le 1er janvier de l’année 2023. Le salaire minimum prévu à l’art. 3 n’est indexé qu’en cas d’augmentation de l’indice des prix à la consommation.
Dérogation 4 Pour le secteur économique visé par l’art. 2 al. 1 let. d de la Loi fédérale sur le travail dans l’industrie, l’artisanat et le commerce (LTr) du 13 mars 1964, à savoir l’agriculture, la viticulture et l’horticulture, le Conseil d’État, sur proposition du Service de l’emploi, peut fixer un salaire minimum dérogeant à l’art. 3 al. 1 de la présente loi, dont le montant reste toutefois indexé conformément à l’art. 3 al. 3 de la présente loi.
Art. 4 Primauté du salaire minimum
1 Si le salaire prévu par le contrat individuel de travail, une convention collective ou un contrat-type
est inférieur à celui fixé à l’art. 3 de la présente loi, c’est ce dernier qui s’applique.
2 Les usages ne peuvent en aucun cas prévoir un salaire minimum inférieur à celui fixé par l’art. 3 de
la présente loi.
Art. 5 Contrôle
Organe de contrôle 1 Le Conseil d’État veille au respect des dispositions de la présente loi et mandate un organe auquel
il donne les moyens d’effectuer des contrôles efficaces sur l’ensemble du territoire. L’exécution est effectuée en collaboration avec les commissions paritaires compétentes.
Information 2 L’organe informe le travailleur concerné ou l’association professionnelle qui l’a saisi des résultats
du contrôle.
Art. 6 Rapport annuel
1 Le Conseil d’État donne mandat à un organe tripartite (État, employeurs, syndicat) pour établir une stratégie de contrôle et présenter un rapport annuel portant sur l’application du salaire minimum dans les différentes branches économiques du canton, sur le nombre et la fréquence des contrôles effectués et sur les sanctions éventuelles prises à l’encontre des contrevenants. Ce rapport est public
et transmis au Grand Conseil.
Art. 7 Contraventions
1 Celui qui contrevient à la présente loi, à ses règlements d’application ou aux décisions fondées sur ceux-ci est passible d’une amende de 2 000 francs maximum. En cas de récidive, l’amende est de 500
à 30 000 francs.
2 La poursuite a lieu conformément à la loi sur les contraventions du 19 mai 2009 (LContr).
3 La poursuite des infractions tombant sous le coup de la loi pénale sont réservées.
Art. 8 Mise en application / entrée en vigueur
Délai 1 La loi entre en vigueur après un délai d’au moins 6 mois pour le 1er janvier ou le 1er juillet suivant
l’adoption de la loi en votation populaire.
2 L’entrée en vigueur de la présente loi est subordonnée à l’acceptation par le peuple de l’initiative constitutionnelle « pour le droit à vivre dignement de son travail : un salaire minimum cantonal » portant sur la révision de l’art. 60 de la Constitution du Canton de Vaud
Règlement d ’application 3 Le Conseil d’État édicte un règlement d’application après consultation des partenaires sociaux.
« L’égalité salariale entre hommes et femmes n’est toujours pas la réalité et impacte les travailleuses au quotidien et à la retraite. Le salaire minimum cantonal est un enjeu féministe majeur. » Gabriella Lima, Solidarités
« Travailler ne doit pas rimer avec pauvreté. Le salaire minimum cantonal est nécessaire et renforce la lutte contre la pauvreté prévue par les PC familles ainsi que les conventions collectives de travail. » Arnaud Bouverat, secrétaire régional Unia
« Le salaire minimum cantonal répond à une nécessité sociale reconnue par le Tribunal fédéral. Son introduction est urgente, alors que les salaires réels baissent face à l’augmentation des prix et des primes d’assurance-maladie. » Pierre-Yves Maillard, président de l’Union syndicale Suisse
« Les coûts de la vie augmentent aujourd’hui de manière disproportionnée pour les personnes à bas salaires. L’introduction d’un salaire minimum à 23 francs et un mécanisme d’indexation automatique est une réponse socialement utile et économiquement efficace. » Samuel Bendahan, Conseiller national PS
« On ne peut pas se plaindre des hausses de la facture sociale dans ce canton et rester inactif face au scandale des bas salaires. L’Etat, les communes et les employeurs doivent tous faire leur part pour lutter contre la pauvreté des salarié-e-s. » Rebecca Joly, Présidente du Groupe des Vert-e-s au Grand Conseil
« L’intégration n’est pas possible dans une situation de pauvreté. Chaque travailleuse ou travailleur, indépendamment de sa nationalité ou de sa branche, a droit à un salaire digne. Le salaire minimum est un garant d’intégration. » Elizabete Cunha, conseillère communal POP à Renens